Cette décision du Tribunal de Grande Instance de Paris s’inscrit dans la lignée des arrêts de la Cour de Justice de l’Union Européenne rendus au sujet de l’utilisation des marques de concurrents comme mots-clés dans le service de référencement Google AdWords.
Dans cette affaire, après un examen non seulement de l’annonce litigieuse mais aussi du site internet vers lequel cette annonce renvoie, le Tribunal conclut à une contrefaçon de la marque du concurrent, en raison de l’atteinte à la fonction d’identification de la marque, caractérisée par l’absence d’informations suffisantes sur la véritable identité de l’annonceur et l’origine des produits et services qu’il propose.
Les Juges français rappellent d’abord que :
« Lorsque l’usage par un tiers d’un signe identique à la marque est fait pour des produits identiques ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, le titulaire de la marque est habilité à en interdire l’usage si celui-ci est susceptible de porter atteinte à l’une des fonctions de la marque et notamment sa fonction d’identification.
La question de savoir s’il y a une atteinte à la fonction d’identification de la marque dépend de la façon dont est présentée l’annonce suscitée par le mot-clé identique à cette marque. Ainsi, il y a atteinte à la fonction d’identification de la marque lorsque l’annonce ne permet pas ou permet difficilement à l’internaute normalement informé et raisonnablement attentif, de savoir si les produits ou services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou au contraire d’un tiers. »
L’examen des annonces en cause, de leur présentation et du contenu du site internet vers lequel elles renvoient conduit le Tribunal à considérer que, dans cette affaire, il existe un risque de confusion de l’internaute, entretenu tant par le flou de l’annonce que par la généralité des textes sur le site de l’annonceur et sa présentation.
Le Tribunal relève en effet que l’annonce ne contient « que des termes génériques et descriptifs des services proposés » et « même le nom du site ne permet pas d’identifier l’origine des services proposés ».
Il souligne aussi que sur la page d’accueil du site de l’annonceur, l’internaute ne peut pas identifier facilement qu’il s’agirait d’une société différente de celle du concurrent, dont la marque est utilisée comme mot clé. Au contraire, les services de ce concurrent sont également proposés sur ce site.
Ainsi, selon le Tribunal, l’internaute normalement informé qui tape la marque du concurrent pour rechercher les services proposés par celui-ci (en l’occurrence, des stages de récupération de points du permis de conduire) peut croire que l’annonce litigieuse est économiquement liée à celui-ci, car l’annonceur ne s’identifie pas et se présente comme un site centralisateur de tous les stages de récupération de points.
Ces éléments, et notamment ce défaut d’information suffisante sur l’origine des produits et services proposés par l’annonceur, caractérisent pour le Tribunal une atteinte à la fonction d’identification de la marque, et donc une contrefaçon.
Un aspect intéressant de cette décision est l’étude du contenu du site dont l’annonce fait la promotion, en plus de celle du contenu de l’annonce, pour apprécier l’existence d’une atteinte à la fonction d’identification de la marque.
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